Arbol del amor – Un conte de Noël

Je m’appelle l’Arbol del amor. Je prends racines en Amérique Latine au pays des Incas et des Mayas, au plus près de civilisations anciennes et indigènes. Mes racines sont les émanations de ces hommes, les tohus bohus qui couraient pieds nus, d’un point à un autre, des landes et des montagnes. A force d’allers et de venues, leurs pieds ont semé des engrais. Mes racines ont sillonné la terre et mon tronc s’est enflé au centre du globe, tous les jours plus grand, tous les jours plus suave, gorgé de sève et de nutriments qui bruissent de mille vies. Des oranges ont poussé dans mes branches, des anones, des ananas, des avocats, des fraises, des mangues. Ils ont tous poussé sans s’écarter comme des boules sur un sapin de Noël, comme si c’était tous les jours Noël. Des singes, des enfants, des agriculteurs, des athlètes ont grimpé dans mes bras pour goûter aux saveurs enchantées. Dans mes branches, ils se sont salués, se sont enlacés et pour certains se sont aimés. Ils ne se sont pas battus, il y avait tant de jus. Ils ont tous bu, ils ont tous laissé couler et ils se sont enivrés. Mon jus est blanc, transparent, rafraichissant. Plus besoin d’or noir, de pétrodollars ou de lollars. Seulement du jus de lumière, du jus d’arboré. Les femmes viennent de loin emplir leurs jarres à ma source. A peine se sont- elles penché devant ma fontaine que leur aura s’est transformée ; elles ont toutes 20 ou 30 ans ; tout au plus 40. Mon élixir est celui de la jouvence. Ce sont les femmes qui s’en abreuvent et elles qui l’instillent à leurs hommes si elles le souhaitent. Eux sont musclés et halés ; le soleil est doux ; mon chapeau le transforme, Il n’y a pas de fumée, pas de rayons X qui crament. Ma boule transforme tout en douceur et en jus. Ma boule régule la température, le tempérament. Pas de réchauffement climatique, pas d’emportement colérique. Je suis l’Arbol del amor, je viens du fonds de la terre et j’enlace la planète de mes arêtes. Je suis un arbre poisson, un arbre chanson, un arbre python. Pythie, prophétie. Les hommes se plient enfin  à ma prophétie. Merci pour les bougies. Même quand on me les allume la veille de Noël, elles ne brulent pas, elles éclairent seulement. Je suis l’Arbol del Amor, l’arbre de la lumière qui enveloppe la terre.

Adam et Eve sont légèrement vêtus et n’ont pas honte d’être dévêtus, Ils ne cherchent plus à connaitre ni à transmettre, seulement à être. Dans le creux de mes branches evergreen, ils se lovent et se perdent ; love at first sight, love at last sight, love at last sigh. Je suis l’Arbol del Amor, le pourvoyeur d’oxygène ; pas d’effet de serre, plutôt de dessert, de desserre. Desserre ta poigne sur l’humanité, sur les sociétés. Je suis l’arbre qui enveloppe ; pas celui qui empoigne ; je suis l’arbre qui veille, la veille de Noël, la veille du soir, la veille du noir.

Je pousse dans le centre de la terre pour éloigner le vers de terre. Je suis un arbre de vers, de poètes, des vers pour aller vers, des vers pour s’élancer, du vert pour respirer. Ne m’envoyer pas en l’air. Joyeux Noël.